Qui paiera le compteur Linky ?

Le coût de l’installation de Linky sera-t-il répercuté sur votre facture ?

Un article de LCI. Ou comment à la fois soutenir Enedis et en même temps faire croire que le nouveau compteur va profiter aux consommateurs !

Il ne faut oublier que, dès le départ, Enedis a toujours dit que le compteur serait gratuit ! Il ne faut pas oublier que le compteur sera payé et que les factures vont augmenter !

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 Un post facebook partagé 12.000 fois affirme que le compteur Linky sera facturé dès l’an prochain aux usagers à raison de 15 € par an pendant 10 ans. Nous avons vérifié.

Le déploiement à grande échelle des compteurs Linky se poursuit, Enedis s’étant engagé auprès de l’Etat à ce qu’il soit terminé à la fin de l’année 2021. Un processus qui a suscité de nombreuses controverses, des citoyens refusant que l’opérateur procède à l’installation du compteur communicant à leur domicile. Si le remplacement est en apparence sans frais pour les usagers, des internautes ont dénoncé le fait qu’Enedis facture de manière détournée son coût.

Une publication Facebook, partagée plus de 12.000 fois, alimente les discussions. « Non seulement on vous l’installe de force, mais en plus à partir de l’année prochaine il va falloir le payer ce ‘compteur tricheur’. Le prix (environ 130€), sera répercuté sur vos factures à partir de 2021 (15€/an sur une durée de 10 ans) », peut-on lire.

Les assos montent au créneau

Le consommateur va-t-il, au bout du compte, financer le remplacement des anciens compteurs par les Linky ? Oui, déplore l’association de consommateurs UFC-Que Choisir. Elle indique que « vous allez payer 15 € par an pendant 10 ans pour permettre à Enedis d’installer un compteur communicant pour lequel vous n’avez aucune contrepartie ». Enedis qui, par cette opération, « empocherait une marge de 500 millions d’euros ».

Un constat repris par l’hebdomadaire Marianne, qui précise que « la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et le distributeur d’électricité ont en effet décidé d’appliquer un système de différé tarifaire ». En somme, si « l’installation, dont le coût unitaire est évalué à 130 euros, n’est pas immédiatement facturée aux ménages, Enedis n’a accepté que temporairement de prendre en charge la totalité des frais de mise en place ».

Enedis a exigé un droit de réponse à l’UFC-Que Choisir, rétorquant que « ni le compteur, ni l’intervention de remplacement ne leurs sont facturés ». Ce qui a fait bondir l’association : elle a maintenu sa position en se référant à un rapport de la Cour des comptes, paru en 2018. Ce dernier est formel et met en avant « des conditions avantageuses pour Enedis », ainsi qu’un « financement assuré par les usagers ». Assez sévère, la Cour juge que le différé tarifaire qui va conduire les usagers à assumer indirectement l’installation des compteurs présente un « coût excessif ».

L’entreprise, qui s’estime dans son bon droit, note que « la rémunération du projet […] a été évaluée par la commission de régulation de l’énergie qui l’encadre depuis 2007″. Et insiste sur le fait que « le remplacement de 35 millions de compteurs en seulement 6 ans constitue un défi industriel et logistique hors norme, qui a permis la création de plusieurs milliers d’emplois ».

Un phénomène de compensation

Comme le souligne la Cour des comptes, « seuls les gains au niveau des consommateurs justifient économiquement le projet ». Des gains promis par Enedis, qui peut notamment s’appuyer sur des chiffres fournis par l’Ademe. Cette dernière évoque « des taux d’économies d’énergie allant jusqu’à environ 8% en moyenne, et même 10% pour les gros consommateurs ». Des estimations que juge incertaines l’UFC-Que Choisir.

Contacté par LCI, Enedis se montre très clair et assure qu’il n’y aura « aucun impact sur la facture des Français ». Et pour cause : l’entreprise indique que le remplacement des anciens compteurs lui permet de réaliser chaque année des économies majeures, « les téléopérations permettent d’éviter un grand nombre de rendez-vous chez les clients, et ainsi de réduire le volume de déplacement. On mesure aujourd’hui avec les 28 millions de compteurs Linky les économies notables qui peuvent être réalisées ».

Enedis estime que le montant de 15 euros annuels évoqué par l’UFC-Que Choisir ne repose sur aucun élément concret, et précise que sa rémunération est encadrée strictement par la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Celle-ci va certes répercuter les coûts sur la facture d’électricité*, mais sans pour autant que cela ne soit synonyme de hausse pour le client. La CRE devra en effet prendre en considération dans ses calculs les économies réalisées grâce à Linky par Enedis. Pour schématiser, Enedis glisse qu’on pourra voir dans cette adaptation une forme de « annule et remplace », insistant sur le fait que ses clients ne paieront pas davantage.

En conclusion, il est donc juste d’affirmer que l’installation des compteurs Linky est répercutée sur les consommateurs. Une opération jugée très avantageuse pour Enedis par la Cour des comptes mais qui devrait in fine également profiter aux consommateurs. Ceux-ci vont en effet bénéficier de manière indirecte des économies réalisées par l’entreprise grâce à Linky et ne pas voir leur facture augmenter. C’est en tout cas la promesse du gestionnaire du réseau de distribution électrique, qui assure observer grâce aux millions de compteurs déjà remplacés des économies structurelles et dans la consommation de ses clients.

 

*via le TURPE (Tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité), ce qui se retrouvera dans la section CTA (Contribution tarifaire d’acheminement)