Pourquoi rejeter l’appli stop-covid ?

Nous en avions déjà fait mention dans un article en date du 28 mai

https://collectif-accad.fr/site/rejeter-stopcovid/

« L’âge de faire » en remet une couche

L’appli StopCovid, entre doudou et gourou

Je n’ai rien contre l’ami de mon ami qui va installer sur son smartphone la fameuse application StopCovid : on se rassure comme on peut. De mon côté, je trouve cette application anxiogène au possible : attendre de recevoir, à tout moment, une notification comme quoi j’ai peut-être le Covid, alors que je n’ai aucun symptôme, me rendrait peut-être malade de stress. C’est quand même plus simple d’éviter les situations dans lesquelles je peux l’attraper, non ? L’appli est peut-être faite pour les gens obligés de s’entasser dans le métro, comme un palliatif. Si c’est le cas, ça en dit long sur notre époque. Et puis j’aurais même tendance à penser que ce genre de fausse solution peut être dangereuse, car elle peut laisser penser que les gestes « barrière » ne sont pas si importants que ça. Comme les gens qui vous collent avec leur masque parce qu’ils croient qu’il s’agit d’un masque magique.
Non, pour que cette app’ soit vraiment efficace, il faudrait mettre le paquet : une géolocalisation en temps réel de tout le monde, des drones capables d’intervenir dans la minute, des capteurs partout dans la ville, des micros pour repérer les gens qui toussent… J’exagère un peu, mais en Chine, ils y sont presque.
Quand on installe StopCovid, on n’apporte pas sa pierre à un monde tel qu’on voudrait qu’il soit, c’est certain. Pourtant, au moment même où l’on télécharge l’application, on participe, qu’on le veuille ou non, à construire « quelque chose ». Le monde prend forme comme ça, par petites touches concrètes. C’est notamment l’avis du philosophe allemand Günther Anders, qui a réfléchi à notre rapport à la technique : « À l’opposé de l’utopiste, qui imagine un monde qu’il ne peut réaliser, l’homo technicus produit un monde qu’il n’est pas capable d’imaginer. »

Avec la situation du confinement, caricaturale, on entrevoit malheureusement ce monde « en marche », comme dirait l’autre, un monde qui n’a pas attendu le covid pour se déployer, un monde « déréalisé », « sans contact ». On n’entrevoit pas uniquement l’espace public, réduit au strict nécessaire, bardé de capteurs, où nous serions nos propres espions grâce à nos smartphones. On voit aussi un monde dans lequel la monnaie, symbole de l’échange, est dématérialisée ; dans lequel on produit, on consomme et on drague devant un écran. Le risque zéro existe presque. Celui de ne jamais se sentir seul, sans pour autant devoir prendre aucun risque en côtoyant l’inconnu. Un monde dont la seule vertu est l’efficacité. À moins d’être fou, qui veut d’un monde pareil pour ses enfants ?
L’âge de faire est signataire d’un appel initié par le collectif Écran total pour s’opposer au « monde sans contact », donc refuser l’appli StopCovid. En effet, installer StopCovid, c’est faire un petit pas de plus dans cette direction. Une pratique un peu bizarre au début, comme le fait de pouvoir joindre quelqu’un ou d’être joint 24h/24, comme les caméras de surveillance, ou les drones dans le ciel, mais qui deviendrait une habitude, voire un besoin, parce qu’ « on ne sait jamais », c’est rassurant. Et puis on s’habitue à tout.
Pour La Boétie, l’auteur du Discours de la servitude volontaire, la tyrannie repose moins sur la répression que sur la dépossession volontaire de la liberté. Et puis on s’habitue, on oublie sa servitude. Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour nous rassurer ?
« Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres », écrivait-il. 472 ans plus tard, refuser d’installer StopCovid, c’est peut-être expérimenter cette liberté. On le répète, pour les plus anxieux, ne pas télécharger cette appli n’est pas dangereux. La seule solution pour se prémunir et lutter contre la propagation du virus, en effet, on la connaît, et c’est une solution plutôt réjouissante : faire preuve d’attention dans notre rapport aux autres, en particulier auprès des plus fragiles. Une façon d’apporter sa pierre à un monde tel qu’on voudrait qu’il soit.

https://lagedefaire-lejournal.fr/lappli-stopcovid-ent

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Pas encore convaincu.e ?

Voici ce qu’en pensent le conseil de l’ordre du barreau de Paris, puis la Ligue des Droits de l’Homme

À Paris, le conseil de l’ordre appelle les avocats à ne pas installer « StopCovid »

Lors de sa séance du 26 mai 2020, le conseil de l’ordre du barreau de Paris a adopté une délibération alertant sur « les risques d’atteinte aux droits et libertés fondamentaux pour tout utilisateur de l’application StopCovid ». Il déclare partager les inquiétudes de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme qui estime, dans ses avis du 28 avril et du 26 mai 2020, que le suivi numérique des personnes présente notamment un risque d’atteinte à la vie privée « pour une efficacité incertaine » et craint qu’il « ne favorise à l’avenir l’usage de ce même type de technologie à d’autres fins » que celles de santé publique. Le conseil de l’ordre « invite donc les avocats parisiens à ne pas installer cette application et à limiter l’usage de la fonction Bluetooth aux seules applications professionnelles présentant des niveaux de sécurité satisfaisante ». Il les appelle également « à la plus grande vigilance sur l’utilisation de cette application sur leurs smartphones personnels ».

Société de surveillance. À noter que dans une motion adoptée le 15 mai 2020, l’assemblée générale du Conseil national des barreaux s’était, de son côté, inquiétée que « les mesures de traçage numérique et de limitation des libertés personnelles soient fondées sur un consentement apparent lié aux incertitudes et à l’accroissement de la peur de l’épidémie » et s’était alarmé « que le dispositif présente un risque grave de dérives vers une société de surveillance ».

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Ligue des droits de l’homme

Bien que le parlement ait voté en faveur du déploiement de l’application StopCovid, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) continue à alerter sur les dangers pour la vie privée et les libertés que présente son utilisation. Sécurité, fiabilité, anonymat, inefficacité, discriminations, durée de conservation et effacement, consentement « faussé », acceptabilité d’une surveillance généralisée, tels sont les problèmes que pose StopCovid.

Rappel du fonctionnement

L’application StopCovid installée volontairement sur son smartphone permettra à une personne testée positive au coronavirus d’alerter automatiquement tous les utilisateurs avec lesquels le Bluetooth de son smartphone a été en contact récemment (moins d’un mètre et plus de quinze minutes), afin qu’ils se fassent tester.

Fiabilité, sécurité

L’inventeur du Bluetooth qui permet aux appareils électroniques de communiquer entre eux alerte sur :

le manque de fiabilité : le Bluetooth n’a pas été prévu pour mesurer des distances entre les personnes ce qui entraîne des risques d’une part de ne pas détecter des cas positifs (ceux qui ont vraiment été en contact mais ne seraient pas informés peuvent continuer à contaminer) ou au contraire des fausses alertes (risques de demandes de tests et encombrement des services de santé) ;

le manque de sécurité du Bluetooth qui devra être activé en permanence permet le piratage de toutes les données du téléphone.

Efficacité incertaine

Les épidémiologistes indiquent que 60% de la population devrait utiliser l’application pour qu’elle soit efficace, or les expériences de Singapour ou Corée du Sud montrent que seuls 15 à 30% l’ont installée.       ………..

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Toujours pas convaincu.e ?

Lisez ces textes parus :

D’abord l’appel à refuser le monde sans contact

https://lesamisdebartleby.wordpress.com/2

Ensuite les position de « la quadrature du net » et de l’ugict CGT

https://www.laquadrature.net/2020/04/14/nos-

http://www.ugict.cgt.fr/articles/references/sto