Madame MOREL  et les médias

Comment les médias ont réagi après l’audience en tribunal du 4 octobre ?

Une web-radio (micros-rebelles) et l’édition de La Voix du Nord Arras ont relaté cet assignation en tribunal à l’encontre d’Enedis pour cause de surfacturation le plus objectivement possible. Plusieurs médias ont emboité le pas : FR3-région, radio-Plus, radio PFM, pages facebook, boursourama … et plusieurs collectifs anti-Linky.

Le site de BFMTV a mis en doute les arguments développés lors de la séance au tribunal. C’est le seul média ayant eu à traiter ce problème qui a eu cette attitude aussi critique. Un article de Pascal SAMAMA en date du 11 octobre.

« Un compteur Linky a-t-il vraiment fait exploser la facture de cette retraitée d’Arras ? »

https://www.bfmtv.com/economie/un-compteur-linky-a-t-il-

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En réponse à cet article de BFMTV

Voilà comment Enedis contre-attaque : en général par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs médias ! Cette fois-ci c’est BFMTV  qui s’est attelé à la lourde tâche.

Première remarque : il faut comparer ce qui est comparable : 2019 n’est pas 2016 au niveau de la part fixe… et des tarifs de consommation.

Deuxième remarque : en s’appuyant sur un document fourni par le médiateur EDF en février 2019 à un défenseur des droits, on peut constater que la consommation fluctuait de 2012 à 2016 entre 66 et 106 kWh. Si EDF pense maintenant que c’était exagérément bas –ils pouvaient regarder les chiffres jusque 10 ans en arrière-, comment se fait-il que ce fournisseur d’électricité ne soit pas intervenu durant ces années avant la pose du Linky ? C’est tout de même remarquable d’analyser l’attitude de cette entreprise : elle ne voit rien, ne dit rien ; mais quand cela se gâte –parce qu’une personne refuse de payer- elle prétend que c’est l’usager qui triche !

Troisième remarque : toujours à partir du document du médiateur, comparons ce qui est comparable après la pose du Linky :

– de janvier 2017 à septembre 2017 : consommation de 2208 kWh

– de janvier 2018 à septembre 2018 : consommation de 565 kWh

Pourquoi pas toute l’année ? Parce que Madame MOREL a eu son électricité coupée en août 2018. Donc la comparaison se fait sur des périodes identiques.

Autre élément de calcul moins probant : en 2017, 2999 kWh ont été consommés ; en 2018 (avec 87 jours de coupure), seulement 592 kWh !

En tout cas, l’argumentaire en deux temps de l’avocat  de Madame MOREL, Christophe LOONIS, a été principalement le suivant, basé sur des documents officiels provenant essentiellement d’EDF :

  • il y a eu augmentation notable durant l’année de la pose de Linky. Si dysfonctionnement il y a eu avec l’ancien compteur, la preuve est à fournir avec l’ancien compteur. Enedis aura du mal pour le démontrer car il y a longtemps que l’ancien compteur n’est plus dans leurs « archives ».

Par ailleurs, avec ses statistiques décennales, EDF ou Enedis se rend compte seulement début 2018, quand Madame MOREL n’a pas voulu tout payer, que le compteur ne devait pas fonctionner … EDF ne remet pas en cause le compteur mais dénonce une triche !

  • Deuxième argument qui montre que Linky n’est pas fiable (ou serait trafiquable par Enedis !) : la consommation de 2017 –avec Linky- est beaucoup plus importante qu’en 2018 –toujours avec Linky. Bien sûr Enedis dira que Madame MOREL a changé son mode de consommation en voyant la facture de fin 2017 !

Il est évident que Madame MOREL, à 84 ans, a su trafiquer son ancien compteur ! Il est également évident qu’elle a changé ses habitudes après s’être rendu compte de sa consommation « excessive » en 2017 ! Elle a dû acheter une voiture électrique !

Par ailleurs, le litige porte sur cette facture de 500 €. Début 2018, Madame MOREL a refusé de payer cette facture énorme mais a tout de même payé, ce qu’elle payait en 2016, soit 100 € -ce qui explique qu’EDF a réagi en coupant l’arrivée d’électricité. Maintenant, elle paie régulièrement ses factures qui lui paraissent assez normales car, comme chacun sait, depuis novembre 2018, elle relève tous les jours sa consommation  qui varie de 0 à 3 kWh –pour une moyenne journalière qui tourne entre 1 et 1,5 kWh.

A noter également qu’Enedis n’a pas cru bon de se faire représenter par un avocat. Cette entreprise a dû penser qu’il suffisait qu’un employé payé par elle suffirait pour convaincre le Tribunal -puisque la plupart du temps les tribunaux vont dans le sens d’Enedis, avec quelquefois des justifications très étonnantes ! En tout cas, il faut espérer que le tribunal s’appuiera sur des écrits précis pour prendre la bonne décision.

Le jugement qui sera rendu le 22 novembre sera effectivement très important. Les faits ayant occasionné une attaque en justice sont, à notre avis, concordants et méritent ce que l’on a essayé de faire.

Puisque le journaliste de BFMTV mentionne Selectra, « un comparateur indépendant indépendant des fournisseurs d’électricité et de gaz », une première remarque à ce sujet : leurs comparatifs sont des modèles moyens de consommation, ce qu’est capable de faire EDF ou Enedis avec ses modèles « de profils » par type de contrats. Il est toutefois impossible d’en tirer des conclusions à cause de la diversité des matériels électriques, des habitudes de consommation etc…..

Par ailleurs, quand on lit l’article écrit sur le site de Selectra :

https://selectra.info/energie/actualites/marche/com

on peut largement mettre en doute cette indépendance. On croirait lire les arguments d’Enedis. Même sur leurs explications concernant l’ « l’Union  européenne » ! En tout cas, la journaliste ne doit pas connaître la différence entre ElectroSensible et ElectroHyperSensible.

Un autre complément d’information concerne Aude DANIELI, doctorante à l’École des Ponts Paristech –mentionnée dans l’article de BFMTV. Elle a été longuement interrogée sur le site Usbek & Rica. Et c’est sur cette intervention que s’appuie le correspondant de BFMTV. Le problème de la facture a été abordé à la marge sur le site et en tout cas sans donner des exemples concrets ! C’est comme cela que se fait l’information : sur des affirmations non étayées. Mais il est de bon ton de laisser parler un ou une « experte » car cela fait plus sérieux.

Par ailleurs, il faut rappeler ce fait qui a été souligné récemment par le médiateur de l’énergie : les coupures d’électricité pour impayés explosent cette année. Cela prouve au moins ceci : il va être de plus en plus dur pour les usagers de payer les factures qui augmentent de façon disproportionnée –d’autant plus qu’il est prévu encore des augmentations importantes du prix de l’électricité en 2020. La surfacturation de Madame MOREL est un exemple des dérapages possibles de la part d’EDF et de sa filiale Enedis.

Autre élément à prendre en compte

Face à la montée en charge du refus (71/78%) et aux enjeux colossaux, ce n’est  plus la SA Enedis qui pilote la stratégie du déploiement, mais des professionnels qui travaillent 24h sur 24 pour contrer le mieux du possible en temps réel le mouvement du refus par moult actions destinées à tromper le maximum de citoyens consommateurs.

Enedis a du mal à reconnaître cette nouvelle résistance  et il est difficile de croire cette entreprise qui donne des chiffres invérifiables parce qu’incontrôlables.  Cela signifie que sa propagande ne tient pas très bien et qu’elle est obligée d’imaginer de nouvelles parades plus ou moins valables pour tenter de faire passer son message difficilement crédible. C’est d’ailleurs pour cela que des médias fidèles ou certaines associations (de consommateurs ou « indépendantes » n’hésitent pas à divulguer des infox qui sont à peu de choses près la copie conforme du discours d’Enedis. Les derniers exemples récents : un article dans libé, un autre sur 28 minutes (chaîne Arte) ; un sur le site « l’internaute », un autre sur le site de Selectra …

L’exemple de Madame MOREL montre qu’Enedis doit encore se faire aider par un media –BFMTV en l’occurrence-  pour colmater la brèche de la surfacturation. Le principe est toujours le même : il faut instiller la fabrique du doute !

Le chemin est difficile pour Enedis ; cette entreprise ne s’attendait certainement pas à cette résistance justifiée par des analyses et des faits concrets.