Comment la tarification sera dérégulée avec le Linky
Cela fait plusieurs années que l’on parle de cette menace de la facturation heure par heure, permettant aux fournisseurs d’électricité d’être toujours sûr de faire des bénéfices, quel que soit le coût de l’électricité sur les marchés boursiers et de gros.
Pudiquement nommée « facturation dynamique », cette véritable arnaque légalisée (et qui risque de devenir la seule possibilité exclusive pour un contrat de fourniture d’électricité en Europe) révèle une des vraies raisons du déploiement à marche forcée du système Linky.
Raison de plus pour continuer la résistance et garder nos vieux compteurs, qui eux, sont impropres à ce scandale légal mais totalement illégitime.
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Un article provenant du collectif Vallon
En France comme au Texas, les dangers de la « tarification dynamique »
Du 10 au 20 février 2021, le Texas a connu une terrible vague de froid qui a provoqué d’importantes coupures d’électricité, la demande dépassant largement les capacités de production dont une partie était à l’arrêt ? Sur le marché totalement dérégulé, les prix de gros se sont envolés : durant quatre jours, le mégawattheure qui se négocie habituellement autour de 50 dollars, est resté accroché au prix plafond de 9000 dollars fixé par la loi. Des consommateurs ont vu leur facture exploser. Dans la presse américaines, des ménages témoignent : certain doivent payer 5000 dollars pour cinq jours de consommation, d’autres ont reçu une facture mensuelle de près de 17000 dollars (environ 13500 euros). Pourquoi ? Parce qu’ils ont souscrit des contrats à prix variables auprès des fournisseurs privés, ce que l’on appelle la « tarification dynamique ».
Les hasards du calendrier sont parfois facétieux car c’est aussi en février 2021 que ce type d’offre est arrivé en France. Filiale du groupe finlandais Fortum, l’entreprise Barry est la première à proposer aux ménages français un contrat de tarification dynamique ; Grâce à la technologie des compteurs linky, le fournisseur connait instantanément les volumes consommés ; il suffit alors d’appliquer heure par heure le prix en vigueur sur la bourse européenne pour obtenir la facture « dynamique ».
Chez Barry, on est « cool » et on s’adresse au client en le tutoyant : « tu obtiens l’électricité au prix auquel les fournisseurs l’achètent. Envie de réduire les dépenses ? Il te suffit de consommer au moment où l’électricité est la moins chère » (barry.energy/fr).
Tout à fait légal, ce système est même fortement encouragé par l’Union européennes. C’est la directive européenne 2019/944 du 5 juin 2019 qui instaure la tarification dynamique dans les Etats membres. Elle ne se contente pas de l’autoriser mais l’impose : « les Etats membres veillent à ce que les clients finals qui sont équipés d’un compteur intelligent puissent demander à conclure un contrat d’électricité à tarification dynamique auprès d’au moins un fournisseur et auprès de chaque fournisseur qui a plus de 200 000 clients finals ».
En France, la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat autorise le gouvernement à transcrire cette directive par ordonnance. Ce qu’il a discrètement fait le 3 mars dernier avec l’ordonnance 2021-237 qui modifie le Code de la consommation. Quelques garde-fous sont censés protéger le consommateur : le fournisseur « informe le client sur les opportunités, les coûts et les risques liés à une offre à tarification dynamique, » « recueille le consentement du client avant de passer à un contrat à tarification dynamique », et « met à la disposition du client un dispositif d’alerte en cas de variation significative du prix du marché. » Difficile de faire moins contraignant et plus facile à contourner pour des commerciaux sans scrupule.
Mais ces nouvelles dispositions ne concernent pas que les opérateurs privés. Selon la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), les offres réglementées comprenant des périodes mobiles (Tempo, EJP) ne sont pas des tarifications dynamiques au sens de la directive européenne. Avec le nouveau cadre législatif, même l’opérateur public EDF sera donc tenu de proposer des contrats suivant en temps réel les prix de la Bourse.
Le désastre texan n’a pas dissuadé le gouvernement d’imposer ce dispositif scandaleux, qui fait intégralement porter le risque du marche sur le consommateur et exonère le fournisseur. Les ménages précaires sont d’ailleurs les plus vulnérables car ils disposent de très peu de marges de manœuvre pour économiser l’énergie.
Cette affaire dévoile également la vraie fonction du compteur Linky et de ses équivalents : remplacer la tarification régulée et la péréquation du service public par les « lois du marché ».
Energies syndicales