Ondes électromagnétiques

Sommes-nous tous des cibles potentielles ?

Nicole, habitante d’Uzès, est une personne électrosensible. Dans un environnement toujours plus envahi par les ondes des antennes relais et des téléphones portables, son quotidien est devenu un calvaire. De nombreuses personnes seraient électrosensibles sans même le savoir.

EHS. Retenez bien ces trois lettres car vous risquez d’en entendre beaucoup parler.

EHS pour Electro Hyper Sensibilité.

Une pathologie officiellement reconnue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le même organisme qui vient de tirer la sonnette d’alarme sur les dangers potentiels du téléphone portable (voir plus loin). L’EHS se caractérise par une intolérance aux champs électromagnétiques émis par des technologies sans fil comme les téléphones portables et leur corollaire, les antennes relais mais aussi le WIFI, les téléphones sans fil, le bluetooth…On dit alors d’une personne qu’elle est électrosensible.

électrosensible

À Uzès, Nicole fait partie de cette catégorie. Elle est, à sa connaissance, la seule concernée par le sujet sur la ville. Mais pour Nicole, beaucoup d’Uzétiens n’ont pas conscience de leur pathologie.

D’après des chiffres invérifiables, mais qui lui semblent plausibles, environ 10% de la population serait concernée. « Soit environ 800 Uzétiens ». Où peuvent-ils donc bien se trouver ? « Ils sont chez le kiné, à cause de douleurs à la nuque », avance-t-elle. Elle explique que la nuque tendue ou douloureuse est un symptôme commun à beaucoup d’électrosensibles, mais que ni les kinés, ni leurs patients ne font le rapprochement entre cette douleur et leur exposition aux ondes électromagnétiques.

Nathalie Ouzoulias, présidente de l’association Robin des toits (association nationale pour la sécurité sanitaire dans les technologies sans fil) et coordinatrice du secteur Gard/Lozère, ne dit pas mieux. « Il est difficile de parler de quelque chose qui ne se voit pas.

Il y a beaucoup d’électrosensibles qui s’ignorent. Certains médecins généralistes avouent ne pas connaître le dossier et reconnaissent donc leurs limites. Mais trop souvent, des médecins refusent d’y croire et mettent leurs patients sous traitement antidépresseur ».

Nicole, sachant depuis près de dix ans qu’elle était un sujet MCS (hypersensiblité aux produits chimiques multiples) était prévenue qu’elle risquait, plus qu’une autre personne, de devenir électrosensible.

Les deux sont souvent liés. Comme la plupart des MCS, elle s’est auto-diagnostiquée.

Dans son cas, en lisant le livre de Georges Méar, Nos maisons nous empoisonnent.

Déclic

Mais ce que Nicole a du mal à comprendre, c’est pourquoi il lui a fallu trois ans pour prendre conscience de son électrosensiblité alors qu’elle était informée, prévenue… sinon préparée. « Le 19 avril dernier, sur le parking Cluzel, soudain je me suis retournée, j’ai levé les yeux et j’ai « vu » l’antenne relais installée sur le toit de la Poste ». Cette antenne ayant été installée en 2006, pour elle, c’est clair, elle ne « voulait pas » la voir… Maintenant, elle explique par la présence de cette antenne ses difficultés à marcher « sur l’Esplanade, devant la Poste, puis derrière, en traversant le parking Cluzel » et elle fait un détour pour éviter d’être exposée à ces ondes.

Depuis ce jour-là, elle « sait » qu’elle est électrosensible.

Elle en présente les symptômes les plus courants tels que des vertiges (« souvent déclenché par un téléphone portable en veille tout proche, mais aussi chez moi, parfois, peut-être dû au WIFI des voisins ? »), des palpitations, souvent liées aux vertiges… Et encore, il ne s’agit que d’exemples tirés d’une longue liste d’autres troubles dont peuvent souffrir les personnes électrosensibles.

« Ces symptômes sont différents d’une personne à l’autre et d’un jour à l’autre ». Même si certains Uzétiens se montrent compréhensifs quand Nicole évoque le sujet avec eux, d’autres préfèrent en rire. Pour elle, cette dernière réaction est infantile. « Comme si le portable et le WIFI étaient un jouet. Ils ne veulent pas qu’on leur prenne leur jouet. Ils disent que c’est pratique et ne veulent pas remettre en cause cet aspect de leur mode de vie. Et c’est parfois très mal perçu de demander à quelqu’un d’éteindre son téléphone portable ».

Si elle ne peut pas faire grand chose contre l’environnement extérieur (elle ne peut plus par exemple se rendre à la médiathèque, qui a adopté l’internet sans fil, le WIFI), Nicole a dû sacrifier les deux téléphones sans fil qu’elle avait depuis des années. Pourtant, elle savait depuis longtemps que la base de ces téléphones émet des ondes en permanence sur une longue portée. « Mais c’est tellement pratique… ». Elle n’a jamais eu de téléphone portable, pas plus qu’elle ne s’est laissée tenter par le WIFI.

Quel danger ?

Nathalie Ouzoulias de Robin des toits en a la certitude : les ondes électromagnétiques seront « le scandale sanitaire de ces prochaines années ». Pour elle, le fait que l’OMS ait reconnu, il y a quelques jours, que l’utilisation du téléphone portable « peut être cancérigène » est déjà une grande avancée. « Cela va permettre d’approcher les élus avec de nouveaux arguments ».

Mais il n’y a toujours aucune certitude concernant les ondes émises par les antennes relais.

Pour Uzès comme pour toutes les villes de France, le site Cartoradio (www.cartoradio.fr) recense tous les emplacements d’antennes relais. La cité ducale en compte dix, réparties sur toute la ville.

Les endroits sensibles ne sont pas épargnés. On trouve ainsi une antenne à l’Hôpital local et plusieurs autres à proximité du groupe scolaire Jean Macé. Mais les mesures effectuées en 2009 font état de chiffres situés en-dessous du seuil d’exposition maximal autorisé. Celui-ci est fixé à 3 volts par mètre. Pas de danger immédiat, donc. Sauf que pour Nathalie Ouzoulias, ce seuil doit impérativement être revu à la baisse.

« Nous préconisons de baisser ce seuil à 0,6 volts pour toutes les antennes. Des effets biologiques et/ou sanitaires ont été constatés dès 0,7 V/m lors d’études publiées dans des revues scientifiques.

Nous souhaitons aussi qu’aucune antenne ne soit située à moins de 600 m d’une habitation ». Pour Nathalie Ouzoulias, il est d’autant plus urgent d’agir qu’une nouvelle norme de téléphonie mobile, la 4G, va bientôt voir le jour. Elle permettra aux utilisateurs de surfer encore plus vite sur leurs téléphones. « Il va falloir pour cela renforcer les antennes ». Et donc augmenter leur puissance.

Nicole, de son côté, voudrait voir Uzès devenir une ville pilote en matière d’ondes électromagnétiques.

« Il faudrait faire une carte de la ville avec l’emplacement des antennes relais pour que la population et les touristes soient informés. Cela serait bon pour le tourisme… », dit-elle en riant. Si une ville le fait, d’autres suivront ».

 

Le républicain d’Uzès et du Gard