… Et ils ont bien raison !
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) et Enedis ne sont pas contents : en dépit des millions d’euros dépensés en communication, des menaces envoyées aux récalcitrant·es et des très nombreuses poses forcées, 10 % des foyers français ne sont toujours pas équipés de Linky. C’est énorme ! L’âge de faire adresse ses félicitations à tou·te·s ces Gaulois·es réfractaires, et les encourage, pour plusieurs raisons, à tenir bon !
Car plus le temps passe, plus les faits leur donnent raison ! Nous pourrions multiplier les exemples, mais nous avons décidé de nous en tenir, dans cet édito, à la surveillance. Que n’ont pas entendu les opposant·es au Linky lorsqu’ils dénonçaient ce risque ? Ils étaient paranos, fous, complotistes ! « Linky est un compteur qui mesure des courants électriques et qui ne sait pas reconnaître l’électron qui vient de la machine à laver, de la télévision, de votre fer à repasser ou autre », se moquait Bernard Lassus, l’ex-monsieur Linky d’Enedis. Souvenons-nous, également, de cette belle chronique de Dominique Seux, dans la matinale la plus écoutée du pays, sur France Inter. Se moquant de la Ligue des droits de l’Homme, qui avait émis quelques doutes, le grand éditorialiste des Échos ne manquait pas d’ironie :
« La Ligue craint que le relevé de la consommation permette à on ne sait qui, on ne sait quoi, de savoir à quelle heure on se lève, à quelle heure on se couche, on allume son rasoir électrique et sa tondeuse à gazon… Intrusion dans la vie privée ! Big brother ! »
C’était en avril 2016.
Six ans plus tard, nous sommes en mesure de confirmer que Dominique Seux raconte n’importe quoi, tout comme son copain Bernard Lassus. Le premier élément nous a été apporté par Christian Estrosi. Le maire de Nice a expliqué en avril 2020 avoir « sensibilisé les autorités » afin qu’elles utilisent les données recueillies par le compteur Linky. L’édile souhaitait ainsi savoir si des Parisien·nes avaient enfreint les règles en vigueur pour venir passer un confinement plus agréable dans leurs résidences secondaires niçoises. Enedis n’a pas donné suite à la demande. Mais on aura déjà un peu mieux saisi le potentiel du compteur connecté.
En Chine, les autorités ont franchi le pas : les compteurs communicants ont été utilisés pour vérifier que les personnes visées respectaient bien leur placement en quarantaine. Et fin 2020, l’association la Quadrature du net relevait une utilisation encore plus inattendue des compteurs communicants : depuis décembre 2020, les agent·es de contrôle de Pôle emploi disposent « d’un droit de communication les habilitant à obtenir des informations auprès de tiers. À ce titre, ielles peuvent accéder aux relevés bancaires, demander des informations personnelles aux employeurs·ses ou aux fournisseurs de gaz et d’électricité ». Oui, oui, on est bien d’accord, tout cela est complètement ahurissant. Mais tenons-nous-en au sujet de cet édito. Les chômeurs·ses qui auraient l’outrecuidance de s’évader un peu trop longtemps de chez eux au lieu de chercher du boulot en restant sagement assis devant leur ordinateur pourront être confondus grâce à l’étude de leur consommation d’électricité ! Intrusion dans la vie privée ! Big brother !
Ndlr : Pour celles et ceux qui n’ont pas de Linky et qui s’inquiètent suite à la délibération de la CRE du 24 février, laquelle prévoit de faire payer les relèves (4,16 euros par mois) aux seuls foyers non-équipés de compteur communicants : il suffit de faire soi-même deux relevés par an et de les envoyer à Enedis pour éviter cette surfacturation. Des groupes anti-Linky jugent d’ailleurs qu’il s’agirait d’une « sanction discriminatoire » et le collectif Info Linky 5G SOL a déjà prévu de déposer, dans un premier temps, un « recours gracieux ».
N° 172 d’avril 2022 du mensuel « l’âge de faire »
** **
Note du collectif ACCAD
Nous soutenons évidemment les personnes qui ne veulent pas du Linky