Cass€ investigations

Un document de la FNME CGT

Fédération Nationale Mines Énergie

Linky et Gazpar, vrais ou faux amis ?

Depuis deux ans, GRDF et Enedis vantent les mérites de leurs nouveaux compteurs, Linky et Gazpar.

Alors qu’ils sont censés faciliter la vie des usagers, la polémique s’amplifie.

Une évolution nécessaire

C’est, peu ou prou, l’argument invoqué par GRDF et Enedis pour justifier l’installation de cette nouvelle génération de compteurs dits « intelligents » et « communicants ».

Avec onze millions de foyers concernés pour Gazpar et trente-cinq pour Linky, GRDF et Enedis entendent ainsi depuis 2015 équiper les foyers des usagers de ces appareils. « Le compteur change mais pas notre engagement » peut-on ainsi lire sur le site d’Enedis.

« Plus simple, plus clair, plus pratique » claironne GRDF.

Des compteurs idéaux ?

Les nouveaux compteurs doivent nous permettre d’optimiser notre consommation, de faire des économies et de gagner du temps grâce au relevé à distance. Des compteurs idéaux en somme qui promettent de transformer l’usager en « consom’acteur » responsable.

Les deux sociétés invoquent aussi, et en cœur, que ce changement d’équipement se fera « sans frais supplémentaires » et sans risques pour l’usager. C’est ici que, justement, le bât blesse.

Paradoxes

Contrairement à ce qui est annoncé, c’est bien le client qui paiera le branchement du compteur, car son coût sera intégré au tarif de distribution de l’électricité et du gaz.

Par ailleurs, ces compteurs ne sont que des outils de mesure. En aucune façon ils ne permettent de réaliser des économies d’énergie, sauf si l’usager modifie en profondeur ses comportements et habitudes. De plus, si les données permettent à Enedis de tracer l’utilisation de l’électricité dans les foyers, l’accès aux informations est beaucoup plus limité côté usager.

Espions ou amis ?

Si ce dernier n’a plus à se soucier de son relevé de compteur, GRDF et Enedis ne précisent pas qu’il en est de même pour les coupures. Ils ne précisent pas non plus ce qu’il advient des données personnelles qui sont envoyées aux fournisseurs et de leur usage par ceux-ci.

Enfin, côté Linky, bien que le projet soit présenté comme étant d’intérêt général, « mobilisant » dix mille emplois, Enedis se garde bien d’annoncer ce qu’il adviendra du personnel chargé jusqu’alors de relever les compteurs, soit plus de deux mille emplois, à l’horizon 2021.

Les vrais bénéficiaires

Dans la pratique, ces compteurs idéaux ne démontrent pas l’intérêt « révolutionnaire » qu’ils promettent aux usagers. L’on peut alors se demander qui sont les vrais bénéficiaires.

La réponse est à chercher du côté des fournisseurs alternatifs privés. Grâce à l’augmentation du nombre d’informations annexes transmises par Linky et Gazpar, ces derniers vont pouvoir proposer de nouvelles options additionnelles et tarifaires à leurs clients.

La polémique autour de la pose forcée de ces compteurs nouvelle génération est donc loin d’être illégitime. Elle a en outre le mérite de questionner les véritables tenants et aboutissants de ce projet qui, sous des allures d’intérêt général, se dévoile de plus en plus être un outil pour développer le marché de vente d’électricité et la concurrence, financé par le service public et les usagers.

** **

FOCUS

L’Europe divisée

La directive européenne relative à l’efficacité énergétique stipule que « 80 % des consommateurs devraient être équipés de systèmes intelligents de mesure d’ici à 2020, si la mise en place de compteurs intelligents donne lieu à une évaluation favorable. »

S’appuyant sur cet article, la Belgique, la République Tchèque, la Lituanie, la Lettonie, la Slovaquie, le Portugal et la Slovénie ont renoncé aux compteurs intelligents.

L’Allemagne a, elle, limité son déploiement à 15 % des usagers.

Linky et les ondes vagabondes

De nombreux opposants à Linky invoquent un danger sanitaire du fait de l’émission d’ondes électromagnétiques par le compteur.

Selon l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire), Linky respecte les normes européennes sur ce point grâce à son utilisation de la technologie du CPL (courant porteur en ligne). Elle reconnaît cependant que son interaction future avec d’autres objets connectés et compteurs peut poser problème.

Le CRIIREM (Centre de recherche et d’information indépendant sur les rayonnements électromagnétiques) a pour sa part lancé une alerte. Il estime que « les mesures citées dans le dossier de l’ANSES sont incomplètes puisqu’elles n’incluent pas les champs d’induction magnétique et les champs électriques 50 hertz. »

Un rapport de la Cour des comptes émis en février 2018 soutient quant à lui que la question sanitaire n’a pas été assez prise en compte.