Il attaque en justice le parc éolien voisin

Encore un problème d’ondes électromagnétiques

Au Boisle, ses vaches laitières dépérissent

Agriculteur au Boisle, dans la Somme, Yann Joly poursuit le promoteur éolien Enercon dont le parc de 24 mats construit près de son exploitation qu’il accuse d’être à l’origine de la disparition de son élevage. Une première décision de justice sera rendue en janvier, et une dizaine d’éleveurs, en France, ont entamé une action similaire.

C’est une décision de justice très importante qui sera rendue le 11 janvier prochain devant le tribunal de grande instance de Paris. Yann Joly, agriculteur au Boisle, au sud d’Hesdin à la frontière du Pas-de-Calais, attaque en justice le promoteur éolien Enercon.

Le parc de 24 machines érigées près de son exploitation entre 2011 et 2013 serait à l’origine, selon lui, du dépérissement de son troupeau de vaches laitières, qu’il a dû envoyer à l’abattoir en 2015. « C’est très important d’un point de vue financier, car j’ai encore beaucoup de dettes à rembourser, mais également sur le plan moral. On m’a traîné dans la boue, on m’a dit que j’étais un incapable, nous en avons beaucoup souffert et j’attends une reconnaissance. »

Un préjudice évalué à plus d’un million d’euros

Soutenu par l’Association nationale animaux sous tension (Anast), dont il est devenu le secrétaire, et défendu par l’avocat parisien François Lafforgue lors d’une audience qui s’est déroulée mi-novembre devant le TGI de Paris, Yann Joly demande réparation à hauteur de 360 000 euros pour trouble anormal de voisinage. Mais avec des pertes annuelles estimées à 100 000 euros depuis l’abattage de son troupeau, il estime le préjudice global à plus d’un million d’euros.

Pour l’agriculteur, les ennuis débutent en 2011, après l’installation des premiers mats. Très vite, ses vaches refusent de s’abreuver, la qualité du lait est mauvaise, et la production chute d’un tiers. Réalisé à la demande de l’éleveur, une étude menée par un expert agricole et foncier près la cour d’appel d’Amiens établit le lien de causalité entre la présence des éoliennes et la dégradation de l’état de santé de son cheptel. « Cette expertise est un élément important du dossier car elle montre la concomitance entre l’installation des éoliennes et la dégradation du troupeau, et permet d’écarter l’hypothèse d’une maladie », précise Me François Lafforgue.

Omerta

À la même période, un autre rapport rédigé par Alexandre Rusanof, ingénieur géologue, démontre la présence d’une rivière souterraine située sous le bâtiment d’élevage, et qui aurait pu servir de conducteur aux ondes électromagnétiques. Se pose ainsi la question d’un défaut d’isolation des câbles électriques du parc éolien.

Dix ans après le début de ses ennuis et après avoir été contraint de mettre fin à son activité de production laitière, Yann Joly élève quelques bœufs en pâture pour valoriser ses prairies. Mais là encore, il constate des anomalies. Les bêtes ne s’abreuvent pas suffisamment, et connaissent un important déficit de croissance. Déterminé à mener son combat «  jusqu’au bout », l’agriculteur se bat aussi au sein de l’Anast pour porter la parole d’autres victimes. « De nombreux éleveurs connaissent des situations similaires, mais on se retrouve en face de gens honteux qui n’osent pas parler, finissent par céder, voire même se suicider. »

Une dizaine de procédures judiciaires sont en cours, pour des parcs éoliens, mais aussi des lignes à haute tension.

Un impact sur la santé humaine?

Pour Yann Joly, une autre bataille pourrait aussi s’engager. Ses bêtes ne seraient pas les seules à être victimes des ondes électromagnétiques produites par les éoliennes. Depuis l’installation du parc, lui et son épouse souffrent de nausées, de picotements, de douleurs dans les chevilles. « On va encore nous faire passer pour des fous, mais si ça peut tuer des bovins, pourquoi pas nous  ?» Un récent arrêt de la Cour d’appel de Toulouse a reconnu les conséquences néfastes des éoliennes sur deux habitants du Tarn. L’exploitant a, de plus, été condamné à indemniser des riverains à hauteur de 128 000 euros.

 

Le courrier picard

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Champs électromagnétiques et terres rares dans les exploitations de vaches laitières : attention danger ?

Champs électromagnétiques et des terres rares mêlés pourraient conduire à des pathologies graves chez les bovins, voire chez les humains. C’est la conclusion de ToxSeek urgence.

Spécialisée dans le dépistage de polluants, l’association ToxSeek urgence (association du groupe ToxSeek) vient de publier ses conclusions d’une étude qu’elle a réalisée en août 2020 dans trois exploitations de vaches laitières situées dans les Côtes-d’Armor, dans le Nord et en Loire-Atlantique.

«Cocktail explosif pour les éleveurs»

Dans son communiqué, réalisé à l’occasion d’un colloque à l’Assemblée nationale jeudi 9 décembre 2021, elle affirme que « l’augmentation parallèle des champs électromagnétiques (éoliennes, 5G…) et de l’utilisation de métaux à fort pouvoir magnétique (terres rares, métaux paramagnétiques) pose la question d’un impact sanitaire majeur à venir ».

L’association avait déjà évoqué le sujet auprès d’actu L’Éclaireur de Châteaubriant en février 2020 et d’actu Le Courrier indépendant en janvier 2021.

Cette fois, ToxSeek urgence l’écrit clairement : les antennes relais de téléphonie mobile, éoliennes, lignes à haute tension seraient un « cocktail explosif pour les éleveurs ».

L’association relate le cas des trois exploitations où « des vaches meurent, des éleveurs de vaches laitières [sont] en détresse », connaissent une « baisse de production de lait », des « problèmes de reproduction, décès inexpliqués, comportements aberrants… ».

Les champs électromagnétiques associés à une intoxication chronique par les métaux pourraient en être la cause.

L’étude réalisée en 2020 a permis à l’association d’observer que « l’imprégnation toxique aux terres rares (métaux stratégiques utilisés dans les technologies, batteries..) des vaches laitières dans les exploitations témoins est très faible ou nulle pour une majeure partie des sujets, que l’imprégnation toxique moyenne aux terres rares est sept fois plus élevée (augmentation de 600 %) dans les exploitations soumises à un risque électromagnétique élevé et connaissant des problèmes sanitaires importants ».

Effet conjoint?

Cette étude montrerait ainsi « une corrélation entre l’état sanitaire des exploitations agricoles, dont les vaches font l’objet d’imprégnation toxique aux terres rares, et l’environnement électromagnétique ».

L’hypothèse de l’association est simple : « La contamination aux métaux (terres rares) est potentialisée par les champs électromagnétiques (effet antenne)».

Avec pour conséquences ces types d’évolutions cliniques : augmentation des effets de l’intoxication chronique par les métaux et de la sensibilité aux champs électromagnétiques ; apparition de symptômes dermatologiques, neurasthéniques (fatigue chronique) ; syndrome d’électro-hypersensibilité (intolérance aux champs électromagnétiques) ; maladies chroniques et cancers.

En 2015, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié un avis relatif à une « demande d’approfondissement de l’expertise scientifique relative aux conséquences des champs électromagnétiques d’extrêmement basses fréquences sur la santé animale et les performances zootechniques ».

Les connaissances du niveau d’exposition des animaux aux courants parasites sont à ce jour extrêmement limitées. La sensibilité des animaux à ces courants est clairement démontrée en situation expérimentale, mais leur impact sur le niveau de performance et l’état sanitaire des animaux (mammites chez la vache laitière par exemple) dans le contexte multifactoriel des élevages reste mal connu.

Anses

Comment s’est déroulée l’étude

Les premières analyses toxicologiques de poils de vaches laitières ont été réalisées par ToxSeek en août 2020, dans les exploitations agricoles de Philippe Marchandier, à Mazinghien (Nord), où des phénomènes sont décrits notamment par Terres et Territoires, de Muriel et Didier Potiron et de Céline Bouvet à Nozay (Loire-Atlantique) et de Stéphane Le Béchec à Allineuc (Côte-d’Armor).

ToxSeek urgence explique qu’elle a alors d’engagé une étude type cas-témoin sur l’imprégnation toxique aux terres rares d’exploitations agricoles soumis à des champs électromagnétiques importants.

« Il n’y a pas de valeurs seuils chez les animaux, alors il nous fallait ces témoins », note Matthieu Davoli.

L’objectif était de rechercher d’une part s’il existe une relation, pour une vache laitière, entre le fait d’être élevée dans une exploitation à risque électromagnétique élevé et une imprégnation toxique aux terres rares ; d’autre part, de déterminer si l’existence de cette relation peut être corrélée avec une diminution de la productivité des animaux étudiés et une ou des pathologies animales.

Que sont les terres rares?

Les terres rares sont des métaux utilisés dans les technologies et les énergies renouvelables : écrans plats, leds, ordinateurs portables, téléphones portable, batteries, aimants permanents mais aussi dans certains médicaments, pesticides et produit de contraste IRM. « Les terres rares ont des propriétés magnétiques (de 20 à 100 fois supérieur à un aimant classique), note ToxSeek urgence. Ces métaux sont de plus en plus utilisés et ne font pas l’objet de retraitement ou de recyclage. »

Dix exploitations agricoles de Bretagne, de l’Aisne et de l’Orne ont été incluses dans l’étude, ainsi que cinq exploitations agricoles (totalisant 40 vaches laitières dépistées) connaissant des problèmes sanitaires importants (baisse de productivité, dermatites, avortement, décès inexpliqués et/ou problèmes comportementaux), dans un environnement à risque électromagnétique élevé (présence à proximité d’éoliennes, lignes à moyenne et haute tension et/ou d’antennes relais de téléphonie mobile…).

À cela s’ajoutent cinq exploitations agricoles témoins (totalisant 40 vaches laitières dépistées) sans problème sanitaire et dans un environnement à risque électromagnétique faible (absence d’éolienne, de ligne à haute tension et d’antenne relais de téléphonie mobile).

49 métaux analysés

Des analyses toxicologiques dépistant 49 métaux, métaux lourds et terres rares sur les poils de vaches des 80 sujets ont été réalisées (technologie ICP-MS).

L’association ToxSeek urgence précise que « cette contamination a été aussi trouvée dans le cadre d’analyses toxicologiques de métaux, chez l’homme, dans la matrice cheveu, dans d’autres contextes : cluster de cancers pédiatriques à Sainte-Pazanne, personnes souffrant d’électro-hyper-sensibilité. »

«Alerte sanitaire générale gigantesque»

Selon Matthieu Davoli, ce communiqué est aussi une « alerte sanitaire générale gigantesque » : « Le problème n’est pas tant les champs magnétiques eux-mêmes que leur association avec une intoxication chronique par les métaux, et c’est avec cette variable là qu’on devrait mener des études, ce qui n’est pas fait à ce jour. On verra alors que l’impact des champs électromagnétique sur la santé pose un problème lorsqu’il y a une intolérance aux métaux. Il y une quarantaine de laboratoires dans le monde comme le nôtres qui peuvent analyser ces métaux par des technologies innovantes, mais il y a très peu d’équipes de toxicologues spécialisés dans les toxicologies chroniques, malheureusement, alors que ce sont des problématiques très fortes. »

Exemple avec le mercure : « Aujourd’hui, tout le monde est contaminé. Il n’est pas impossible que les maladies qui en découlent n’augmentent pas dans les années à venir. Et en augmentant l’usage des terres rares et des champs électromagnétiques, on risque de voir de plus en plus de maladies se déclarer dans les années à venir chez une partie de la population. »

L’immunité générale a une tendance à la baisse, la problématique étant le facteur morbidité, qui augmente de façon énorme. On ne peut pas qu’il n’y ait pas en jeu au moins quelques facteurs environnementaux. L’affaire est lourde.

https://actu.fr/pays-de-la-loire/nozay_44113/champs-ele