Robin des Toits n’est pas en vacances

Infos de juillet 2023

LES REVEILS NOCTURNES

Votre sommeil est interrompu la nuit, toujours à la même heure, ce peut être un problème organique ; toutefois si vos voisins se plaignent d’être, eux aussi réveillés dans le même temps, les coupables peuvent être : 

– Via le courant électrique, un signal massif du type heures creuses / heures pleines, s’il y a;

La synchronisation nocturne des antennes-relais. 

En effet, le fonctionnement de la téléphonie mobile requiert une synchronisation extrêmement précise de l’ordre du millième de seconde, synchronisation réalisée obligatoirement toutes les 24 heures, la nuit, afin de perturber le moins possible les communications des utilisateurs. 

En revanche, cette action technique perturbe le sommeil des millions de personnes exposées aux rayonnements des antennes-relais. 

Elles sont réveillées à cause de la SCH (Synchronisation Chanel) des antennes-relais qui perturbe les échanges électriques androgènes du métabolisme humain. 

Nous vous invitons à questionner vos voisins pour savoir s’ils sont victimes, eux-aussi, de réveils nocturnes et à quelle heure. 

N’hésitez pas à nous faire part de vos constatations.

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WI-FI ET QUALITÉ DU SOMMEIL

Lorsqu’il est en veille active, notre cerveau émet surtout des ondes rapides, dites bêta (de 12 à 30 Hz), avec l’apparition d’ondes gamma spécifiques (vers 40 Hz) lors d’une activité intellectuelle et mentale (intense). 

Sa fréquence doit descendre à 4 Hz pour accéder au nécessaire et réparateur sommeil profond (les ondes majoritaires sont de type delta de 0,5 à 4 Hz). 

Imaginez : vous posez la tête sur l’oreiller, avec la ferme intention de dormir, et la fréquence de votre cerveau va s’abaisser progressivement pour tenter d’arriver au sommeil profond (4 Hz). 

Si vous dormez avec le Wi-Fi activé (le vôtre ou celui de vos chers voisins geeks et/ou gamers) cette fréquence de pulsation à 10Hz entre en résonance avec celle de votre cerveau, dont la fréquence ne peut de ce fait s’abaisser à 4Hz. 

Vous dormez, mais le sommeil n’est pas récupérateur et vous vous levez fatigué. 

Pour nous, les opérateurs pourraient éteindre la nuit une partie de leurs antennes comme le fait déjà Free, tout en sachant que ce n’est pas pour notre santé mais pour économiser de l’énergie, preuve de la gourmandise énergétique de ces technologies.   

FREE éteint ses antennes 4G la nuit pour économiser de l’énergie

Depuis le 1er juin, l’opérateur télécoms Free met en veille ses antennes relais émettant sur la bande de fréquences 2600 MHz afin d’économiser de l’électricité. Dans le cadre de sa stratégie climat, le groupe Iliad affirme avoir atteint son objectif de 100% d’énergie verte pour ses approvisionnements en France.


https://www.usine-digitale.fr/article/free-eteint-ses

https://www.robindestoits.org/attachment/2476937/

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SUBSTANCES TOXIQUES ET TERRES RARES trouvées dans les cheveux de sénateurs

Substances toxiques et terres rares trouvées dans les cheveux de sénateurs à l’issue d’analyses. Où il est question aussi d’intolérance aux champs électromagnétiques. Informations révélées le 27 juin par plusieurs journaux. 

Des analyses toxicologiques menées sur les cheveux de 26 sénateurs et sénatrices volontaires montrent la présence de mercure, pesticides, plastifiants, mais aussi de terres rares, ces métaux utilisés dans les smartphones et autres objets de haute technologie. 

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OPPOSITION AU PROJET DE LOI SUR L’ACTIVATION A DISTANCE DES TELEPHONES PORTABLES

Nous ne sommes pas les seuls à alerter de longue date sur la possibilité de captation de nos faits et gestes par les nouvelles technologies, de surcroît émettrices d’ondes, atteinte à nos vies privées. 

Le prétexte des Jeux Olympiques pour généraliser la reconnaissance faciale et le projet de loi sur l’activation à distance des téléphones portables, ne concerneront pas que les délinquants. 

D’où notre devoir de vous informer que le Conseil National des Barreaux, institution représentative de la profession d’avocat a voté le 8 juin 2023 une résolution contre l’article 3 du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice concernant l’activation à distance des objets connectés.

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LISONS, OFFRONS, ÉTHIQUE ET SOLIDAIRE

« On achève bien les enfants – Écrans et barbarie numérique » de Fabien Lebrun, aux Éditions Le bord de l’eau (2020) déjà présenté dans la lettre de juin. 

Qui a lu cet ouvrage et entendu une conférence de Fabien LEBRUN, ne peut que prendre de la distance avec des technologies destructrices du vivant et en particulier des enfants, qu’ils soient exploités ou consommateurs.

ON ACHÈVE BIEN LES ENFANTS – Ecrans et barbarie numérique Fabien Lebrun -Ed. Le bord de l’eau – 2020
Avez-vous des enfants ? Si vous n’avez pas lu  « On achève bien les enfants », achetez-le sans tarder ! Si vous avez des petits-enfants aussi, et même si vous n’avez ni l’un ni l’autre.

Et ne gardez pas le livre dans votre bibliothèque, une fois lu : prêtez-le autour de vous, à d’autres parents ou éducateurs. Toute personne aujourd’hui concernée par ce que devient notre société devrait être alertée. Le phénomène se passe nous nos yeux, il est énorme, tellement énorme que nous ne le réalisons pas dans toute sa mesure: nous préparons une génération, celle des enfants d’aujourd’hui, qui aura, en moyenne, nettement moins de capacités physiques, intellectuelles, affectives et morales que les précédentes. Le constat est rude. Trop rude ? Prenez au moins connaissance de tous les exemples, témoignages et travaux scientifiques contenus dans le livre…

Le travail de Fabien Lebrun est important car il est solide et étayé. Il fait la jonction entre des travaux qui insistent d’avantage sur tel ou tel aspect pour les assembler en un tout cohérent, et très parlant. La cause du phénomène : l’omniprésence des écrans dans la vie des enfants et les usages qu’ils en font. 

Il y a trois grands volets complémentaires dans le livre.
Le premier traite des conséquences de l’omniprésence des écrans dans la vie des enfants d’aujourd’hui.
Quelques chiffres concernant les pays occidentaux, issus d’un travail datant de 2019 : les enfants cumulent en moyenne presque trois heures d’écrans (télévision, tablette, smartphone, ordinateur, jeux video) dès l’âge de deux ans. D’après cette enquête, ce chiffre augmente avec l’âge jusqu’à atteindre  presque 6h45 chez les 13-18 ans.

Le problème est double. D’une part, cette fréquentation des écrans créée une addiction.

D’autre part, tout ce temps passé sur des écrans diminue nettement le temps disponible pour d’autres activités essentielles pour le développement des enfants : exercice physique, échanges réels avec d’autres enfants et au sein de la famille, écriture manuelle, activités créatrices.
Il en résulte les problèmes d’obésité chez les jeunes, une capacité d’attention sérieusement diminuée, des difficultés d’apprentissage et de langage, une baisse générale du niveau scolaire. C’est ici qu’on trouve de quoi mettre en pièces l’argument trop souvent proclamé selon lequel la fréquentation précoce des écrans serait essentielle pour la formation intellectuelle des enfants d’aujourd’hui. Les études internationales  (PISA) dégonflent obstinément cette baudruche.
A tout cela s’ajoutent des difficultés de socialisation en dehors du « monde virtuel », comme en témoigne le nombre croissant de jeunes fuyant la vie réelle et se réfugiant dans celle des jeux et d’internet.

Le second volet traite de ce que font les enfants avec ces écrans. Il fait ainsi justice d’un autre argument facile selon lequel ces écrans seraient  un moyen de se cultiver. Toutes les études le montrent ; le pourcentage moyen du temps passé sur ces médias dans ce but ne dépasse pas 10 %. Le reste est du divertissement. Ceci peut déjà constituer un problème, c’est à dire le rapport entre le temps passé sur les écrans par les enfants et sa valeur éducative. Mais, un problème encore plus massif est celui de la nature de ces divertissements.
Pour Fabien Lebrun, il n’advient pas par hasard que les divertissements les plus souvent offerts au choix des enfants soient toxiques  pour leur formation sociale et humaine : la raison de fond est la même pour tous : l’argent. Pour accroître l’audience d’un media, d’un site, d’un jeu vidéo, rien de tel que d’aller chercher dans le public potentiel les tendances les plus basses, ou autrement dit, de taper au-dessous de la ceinture. Les enfants sont victimes avant tout de la course au profit qui animent une majorité d’offreurs de « divertissements ». Les adultes le sont également mais les enfants ont, le plus souvent, moins de défenses.

L’accès au porno par une grande partie des enfants à un âge très bas emporte des conséquences pour le moins préoccupantes.

Il est concomitant avec une baisse de l’attrait pour l’activité sexuelle chez les adolescents et les jeunes adultes, une augmentation de troubles psychologiques chez les enfants. Le porno fait figure d’éducation sexuelle de fait et donne aux jeunes une image très déformée de ce que peut être une sexualité adulte. Elle favorise l’approche d’une sexualité machiste,  où le corps de l’autre n’est qu’un instrument.. Elle se traduit d’ores et déjà par une marchandisation croissante de rapports sexuels dès l’âge du collège, et au collège. (Oui, tout cela, comme le reste, est sourcé et documenté dans le livre…).
Autre versant de la négation de l’autre comme personne, la violence souvent très crue, présente dans de nombreux jeux vidéos ou sites internet. Dans ce monde virtuel, tuer l’autre n’est pas un problème et les enfants ne savent pas toujours distinguer le virtuel de la vraie vie. Le harcèlement scolaire entre jeunes est un autre symptôme de cette absence d’empathie.

Les émissions de télévision de style télé-réalité, souvent suivies par les enfants, se sont multipliées depuis que les entreprises de télévision sont devenues en majorité commerciales. Les limites morales nécessaires à une bonne vie en société ne figurent plus dans ce genre d’émission grand public. La compétition et la vénalité y sont érigées en principe de base, et tous les coups sont permis, y compris la trahison, pour gagner. Ce qui pourrait ressembler à de la coopération n’y a pas sa place, si ce n’est, éventuellement, comme alliance temporaire dans un processus où l’autre n’est de toutes façons qu’un adversaire à éliminer tôt ou tard.

Enfin le troisième volet traite de ce que subissent de nombreux enfants, en Asie ou en Afrique, dans le processus de production et de l’ensemble du cycle de vie des écrans en tout genre, qui vont ensuite inonder le monde… et contribuer aux dommages causés aux enfants occidentaux.

Là aussi, les exemples sont crus mais documentés. C’est ici que le titre du livre, évoquant celui du film « On achève bien les chevaux »,  prend tout son sens, tellement  la moindre empathie pour des  être humains sans défenses disparaît devant l’appât du gain.

Au passage, nous en sommes des complices car  nous en bénéficions en Occident sous  la forme de prix de vente abordables des écrans.

Il y a ces immenses usines chinoises où travaillent essentiellement, par dizaines de milliers, des jeunes, voire des enfants.

Y sont assemblés smartphones et ordinateurs de marques bien connues, dans des conditions d’hygiène et de sécurité impensables chez nous, avec des horaires et des temps de repos qu’on ne trouvait en Europe qu’au XIXème siècle, et en l’absence de droits syndicaux.

Il y a ces mines au Congo, où sont extraits les fameux métaux rares, et où travaillent de nombreux enfants, sans aucune précaution physique, avec un taux de mortalité qu’on peut imaginer, les massacres par des milices, de villages et de familles vivant sur les territoires convoités par les entreprises minières.

Il y a ces dépotoirs géants, dans de grandes villes africaines, où arrivent par bateaux des montagnes de matériel électronique et d’écrans au rebut. Les enfants des bidonvilles voisins vont casser, brûler, décortiquer tous ces matériaux souvent polluants, sans protections, au prix fréquent de leur santé et de leur vie, pour trouver quelques kilos de métaux ou de circuits imprimés à revendre.
On l’a compris, la lecture de ce livre est parfois douloureuse mais elle est salutaire. Fabien Lebrun  n’y invente rien. Il est important que nous sachions…

nb : Fabien Lebrun est sociologue. Son livre ne parle que très peu de l’impact particulièrement sensible des ondes-électro-magnétiques sur la santé des enfants, leurs capacités de développement et leur fertilité future…
Si l’on additionne ce que nous savons à ce sujet (voir ailleurs dans ce site) au constat dressé dans ce livre, les mots manquent pour qualifier ce à quoi la jeune génération d’aujourd’hui est soumise.
Denis Bourgeois

[Complément d’infos : Fabien Lebrun va sortir en début d’année prochaine un livre sur l’exploitation des enfants en Afrique pour récupérer des terres rares si indispensables (!) pour nos ordinateurs]

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A offrir aux jeunes et moins jeunes, la bande dessinée « Les ondes et nous », par Sandy Lepiedansleplat, au prix de 8 €.

Pour la commander, merci d’envoyer votre chèque à l’ordre de Véronique BOULAN à l’adresse suivante : Mme BOULAN – 353 Rue du Maule 78630 ORGEVAL.

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Le téléphone portable ; état des lieux

LE TELEPHONE PORTABLE

Épisode 1 : État des Lieux

Première partie d’une « saga « du téléphone portable de sa conception à sa remise en question en passant par ses méfaits .

https://www.robindestoits.org/attachment/2480210/?

Entretien avec Jacques TESTART *-

Extrait des propos recueillis par Estelle BRATTESANI (Nexus n°139, Mars – Avril 2022)

Nexus : Même la multiplication des téléphones portables est, selon vous, « une prothèse », nuisible à notre santé et à nos relations sociales. En quoi cet appareil est-il un outil du transhumanisme ?

Réponse de Jacques Testart : il s’agit de la première prothèse universelle (presque tous les humains la portent) et permanente (ses propriétaires ne savent plus s’en passer) qui augmente les capacités humaines. Outre certains effets sanitaires liés aux ondes

électromagnétiques, des études montrent la perte relationnelle, l’appauvrissement des échanges, la réduction de liberté. Le transhumanisme est indifférent à de telles conséquences, il a besoin de ces dispositifs pour assurer le contrôle et la régulation qu’il veut imposer. Par ailleurs, la communication numérisée tend à enfermer chacun dans sa bulle en diminuant les interactions sociales et en cultivant des comportements stéréotypés, elle fait de nous en quelques sortes des autistes.

*Biologiste mondialement connu, docteur en sciences, ex-directeur de recherche à l’Inserm, également fondateur et président d’honneur de l’association Sciences citoyennes et défenseur acharné « d’une science contenue dans les limites de la dignité humaine ».

« Faire accepter les technologies de surveillance et de contrôle » En 2004 était édité le : Livre bleu » propositions des industries électroniques et numériques

GRANDS PROGRAMMES STRUCTURANTS 2004

« Pour sortir de la crise par le haut, il faut une relance de grands programmes dans des domaines d’excellence de la France et de l’Europe. La Filière Electronique et Numérique présente dans ce « Livre Bleu » sa contribution aux réflexions sur le choix et les conditions de réalisation de ces grands programmes. »

Extrait de la page 35 :

« Objectif sociétal : Ambition pour la France : atteindre le niveau de l’Europe du Nord en cinq ans. Ambition pour l’Europe: Placer l’Europe au top niveau mondial en sécurité des personnes,des biens, sécurité de l’État et des frontières, protection contre le terrorisme.

[……]

Acceptation par la population

« La sécurité est très souvent vécue dans nos sociétés démocratiques comme une atteinte aux libertés individuelles. Il faut donc faire accepter par la population les technologies utilisées et parmi celles-ci la biométrie, la vidéosurveillance et les contrôles.

Plusieurs méthodes devront être développées par les pouvoirs publics et les industriels pour faire accepter la biométrie. Elles devront être accompagnées d’un effort de convivialité par une reconnaissance de la personne et par l’apport de fonctionnalités attrayantes :

– Éducation dès l’école maternelle, les enfants utilisent cette technologie pour rentrer dans l’école, en sortir, déjeuner à la cantine, et les parents ou leurs représentants s’identifieront pour aller chercher les enfants.

– Introduction dans des biens de consommation, de confort ou des jeux : téléphone portable, ordinateur, voiture, domotique, jeux vidéo

– Développer les services « cardless » à la banque, au supermarché, dans les transports, pour l’accès Internet, …

La même approche ne peut pas être prise pour faire accepter les technologies de surveillance et de contrôle, il faudra probablement recourir à la persuasion et à la réglementation en démontrant l’apport de ces technologies à la sérénité des populations et en minimisant le gène occasionné. Là encore, l’électronique et l’informatique peuvent contribuer largement à cette tâche. »

A savoir : nos associations n’ont pris, hélas, connaissance du contenu de cette page qu’une dizaine d’années après sa publication. L‘information sur « l’impact sociétal des technologies émettrices d’ondes électromagnétiques artificielles » aurait sinon accompagné plus tôt, dans les objets de l’Association Robin des toits, l’information sur leur « impact sanitaire ».

CONGO – Extrait du discours du Prix Nobel de la paix 2018, le Dr Dennis MUKWEGiE – la vérité aux yeux du monde : réquisitoire de 2 min 51 sur le coût humain de la fabrication des objets

« Je m’appelle Denis Mukwege. Je viens d’un des pays les plus riches de la planète. Pourtant, le peuple de mon pays est parmi les plus pauvres du monde.

La réalité troublante est que l’abondance de nos ressources naturelles – or, coltan, cobalt et autres minerais stratégiques – alimente la guerre, source de la violence extrême et de la pauvreté abjecte au Congo. Nous aimons les belles voitures, les bijoux et les gadgets. J’ai moi-même un smartphone. Ces objets contiennent des minerais qu’on trouve chez nous. Souvent extraits dans des conditions inhumaines par de jeunes enfants, victimes d’intimidation et de violences sexuelles.

En conduisant votre voiture électrique, en utilisant votre smartphone ou en admirant vos bijoux, réfléchissez un instant au coût humain de la fabrication de ces objets. En tant que consommateurs, le moins que l’on puisse faire est d’insister pour que ces produits soient fabriqués dans le respect de la dignité humaine. Fermer les yeux devant ce drame, c’est être complice. Ce ne sont pas seulement les auteurs de violences qui sont responsables de leurs crimes, mais aussi ceux qui choisissent de détourner le regard. »

Guillaume PITRON : « Un téléphone portable ne pèse pas 150 grammes, mais 150 kilos »

Extrait d’un entretien avec Marie ASTIER de Reporterre le 5 octobre 2021

De la fabrication des puces électroniques aux immenses hangars pour stocker les données (data centers), le monde « virtuel » aspire une colossale quantité de matières premières. Cette matérialité est dissimulée par les géants du net, explique Guillaume PITRON. Il est journaliste, spécialiste des matières premières et notamment des métaux rares qui servent à fabriquer les outils numériques. Il vient de publier « L’enfer numérique, voyage au bout d’un like » aux Editions Les liens qui libèrent.

Reporterre : Dès l’introduction de votre livre, vous vous adressez aux jeunes de la « génération climat », en leur disant qu’ils se battent pour le climat à coups de hashtags. Sont-ils en train de rater quelque chose ?

Guillaume Pitron : Il y a un risque. Ils s’attaquent à de vrais problèmes environnementaux, l’aviation, la viande, le plastique, etc. Je suis en ligne avec cela. En même temps, ils ne réalisent pas à quel point leur mode de consommation numérique a des conséquences directes, fortes. Je tombe de ma chaise quand je lis dans une étude qu’un jeune de 18 à 25 ans en France a déjà eu six téléphones portables.

Cette génération ne voit pas qu’elle retire d’une main ce qu’elle donne de l’autre. Le numérique est extrêmement confortable, donne un sentiment d’émancipation, fait de nous des dieux au quotidien. Je me demande si cette génération résistera à cet hubris.

Sera-t-elle plus sage que la génération précédente ? Il est permis d’en douter. Donc je la secoue un peu.

[….]

Reporterre : La miniaturisation des objets numériques donne aussi l’impression que leur coût écologique diminue. En fait, c’est l’inverse. En quoi l’exemple des puces électroniques explique-t-il ce paradoxe ?

GP : D’abord, commençons par quelque chose de positif. À l’époque, quand je partais en reportage, j’avais un appareil photo, un téléphone, un caméscope, un dictaphone. Aujourd’hui, j’ai un téléphone. Donc, il y a un gain matériel par le fait que le téléphone fait tout. D’un autre côté, un téléphone qui fait autant de choses et tient dans la poche est un appareil de plus en plus complexe.

Si l’on regarde toute la chaîne de production, toute la matière première mobilisée pour fabriquer un outil numérique, on se rend compte de son immense matérialité. Un téléphone portable ne pèse pas 150 grammes. Il pèse 70, 80, 150 kilos*.

Plus on va vers des technologies numérisées, avec l’appel à des métaux très dilués dans l’écorce terrestre, qu’il faut extraire en sortant énormément de roche, plus ce coût matériel est lourd. La puce est effectivement l’objet qui témoigne le plus de cette matérialité. Si la mondialisation se résumait à un seul objet, ce serait la puce électronique, l’objet le plus petit qui soit. Pour fabriquer une puce, il faut plus de sous-traitants que pour fabriquer un Boeing 747. Et elle a proportionnellement l’impact matériel le plus grand qu’on ait pu calculer : il faut 32 kilos de matière pour une puce de 2 grammes, soit un ratio de 16 000 pour 1 ! J’ai notamment été frappé par la consommation d’eau des usines de fabrication de puces électroniques. En pleine sécheresse à Taïwan, il a fallu l’acheminer par camions citernes. Un ancien ingénieur du secteur m’a parlé franchement : tout ça pour prendre des selfies… A-t-on besoin d’outils aussi puissants pour ces usages ?

*Guillaume Pitron s’appuie sur le travail de l’institut de Wuppertal, en Allemagne, qui calcule combien de matières sont nécessaires pour fabriquer un objet et le compare au poids de l’objet. C’est le Mips : material input per service unit. Pour une puce électronique de 2 grammes, il faut 32 kilos de matière pour la fabriquer, cela signifie qu’il faut 16 000 fois plus de matière que le poids de l’objet final pour l’obtenir.